Charles BAUDELAIRE – Lettre autographe signée à Poulet Malassis.

Tâchez donc de trouver dans votre cœur un nouveau moyen pour me donner le repos que je cherche si ardemment.

Vendu

Charles BAUDELAIRE (1821.1867)

Lettre autographe signée à Auguste Poulet Malassis.

Deux pages in-4°. Adresse autographe sur le 4e feuillet, paraphée par Baudelaire.

Léger manque sur le 4e feuillet (cachet) sans atteinte au texte.

[Paris] – 7 décembre 1858. 9 heures du soir.

 

Baudelaire et ses démêlés contractuels et littéraires avec Poulet Malassis.

« Tâchez donc de trouver dans votre cœur un nouveau moyen pour me donner le repos que je cherche si ardemment. »

 

« Mon cher ami, vous m’avez rendu bien heureux et maintenant vous me rendez très malheureux. Tout ce que contient votre lettre est très juste et vraiment irréfutable, sauf à la fin (l’expédient) qui est absurde. Cependant je réponds à votre lettre, parce qu’elle n’est, en somme, que la répétition d’objections que vous et moi n’avions également prévues et que j’espérais pouvoir lever ou vous faire trouver légères.

Avant tout, deux choses : d’abord, si j’avais accompli toute la besogne qui représente toute la somme désirée, je n’aurais pas besoin d’implorer votre aide. Ensuite, remarquez que je ne m’étais pas dissimulé que c’était là un service exceptionnel ; mais, en même temps, vous aviez compris que c’était pour moi une question de sécurité, de jouissance immédiate, et conséquemment de travail plus actif. Ceci n’avait-il pas une valeur, une valeur moral au moins ? Quand vous me demanderez quelque chose de difficile à accomplir, ou qui implique même un risque, je ferai mes efforts pour le faire.

Maintenant, votre lettre : je vous ai dit, pour résumer brièvement : « j’ai un traité à accomplir ; il me donne un délai de six mois ; je vous délègue le revenu impliqué dans le traité, et, pour vous répondre au cas de paresse ou de mort, je vous laisse un reçu de vos billets, avec la possibilité d’être remboursé sur un revenu d’une autre nature. » Dans aucun des deux cas, je l’avoue, la concordance entre vos échéances et les miennes n’est absolument garantie. (Il n’est question, dans votre lettre, que de cette terrible concordance). Quand, dans notre conversation, vous avez soulevé cette objection, assez grave en effet pour vous, je vous ai répondu que je ne pouvais la résoudre que par le zèle et par la promesse que m’a faite de Calonne d’imprimer toujours et au fur à mesure que je lui enverrai de la matière.

Encore quelques mots : rien de ce que je vous ai dit n’est absurde ; vous ne doutez de rien de ce que je vous ai dit. Tâchez donc de trouver dans votre cœur un nouveau moyen pour me donner le repos que je cherche si ardemment.  Par exemple : billets de moi, payables chez ma mère (petite garantie ajoutée, c’est-à-dire l’horreur d’un protêt chez ma mère) et comme, après tout, Malassis resterait responsable comme endosseur, je lui ferais également les deux délégations en question, quelque absurde que cela puisse paraître.

Ai-je besoin de vous dire que vous pouvez tirer sur moi, comme vous en aviez l’intention (je viens de penser à cette niaiserie), et que je vous prie simplement d’être exact ? Comme vous l’avez l’esprit bizarre, je vous supplie de ne voir ici ni une épigramme ni une câlinerie. Vous avez eu tort de couronner l’explication de vos craintes par des récriminations contre les indiscrets. Pourquoi voulez-vous que je porte des fautes qui ne sont pas les miennes ? Tout à vous. Répondez-moi 22 rue Beautreillis, et tout de suite. Vous devinez sans doute dans quel état je suis. Ch. Baudelaire. Bonjour à De Broise, j’espère bien que vous ne lui racontez pas tout cela. Si vous ne me répondiez pas 22, rue Beautreillis, la lettre ne m’arriverait que fort tard.

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