COLETTE – Les fleurs, l’amitié et l’occupation allemande en 1941.

Sidonie Gabrielle Colette, dite COLETTE (1873.1954)

Lettre autographe signée à son amie Hilda Gélis-Didot.

Deux pages in-4 sur papier bleu à bords effrangés.

[22 novembre 1941 selon une note au crayon]

« L’habitude d’une douce amitié est aussi dangereuse qu’un vice. »

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« Chère Vava, il est minuit moins dix, et je viens de finir mon “devoir de Noël”. Si je l’avais quitté avant de l’avoir fini, il m’aurait trop écœurée. Les œillets m’ont tenu compagnie, et je n’ai pas ce soir le courage de les en blâmer. L’habitude d’une douce amitié est aussi dangereuse qu’un vice, s’i l’on entend par danger le tremblement qui nous vient de la perdre. J’écris mal, je veux dire que je m’exprime mal parce que je suis fatiguée. Mais je vais me coucher avec une sombre énergie.

Hier soir, ayant dîné chez Tonton avec Moreno, nous fûmes reconduites par un camion de mandataire (légumes) aux Halles, sa propriétaire, son gendre et sa fille, tous charmants. Dès que nous démarrâmes, apparurent deux gendarmes (?) allemands. Papiers, explications… Ça s’est très bien arrangé parce qu’un des gendarmes (?) allait de ce côté-là. Ce n’est pas gentil ?

Je vous souhaite une bonne nuit, une vraie guérison. Ce qui peut tenir, dans mon souhait, d’égoïsme, – je n’ose pas y penser. Partagez mon tendre bonsoir avec mes amies très chères, qui dorment sous le toit du Malesherbes’ cottage. Votre Colette.

Maurice m’écrit qu’il ruisselle de fromage à la crème et qu’il s’en va à Albi (30k.) voir la cathédrale et le musée Toulouse-Lautrec. Ce type excelle à transformer tout déplacement en partie de plaisir. »

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Colette surnommait son amie Hilda, “Vava” (nom du perroquet de celle-ci). Nièce de Mme Gaston Fournier et descendante de la famille d’imprimeurs Gélis-Didot, elle fut voisine de Colette au Palais-Royal.